levi jackman

3 septembre 2020

 
 

Nous n’avons pas inventé le monde dans lequel nous vivons, il a été inventé plusieurs fois, de plusieurs façons différentes, et par un nombre incalculable de générations avant la nôtre. Il est cependant possible de lui faire prendre la « bonne direction » si nous regardons ce qui a été fait, si nous savons d’où nous venons, et si nous persévérons. Le passé peu conventionnel de Levi Jackman l’a mené à repenser ce qu’il voit, à se battre (parfois contre lui-même) pour ses convictions, et pour qui il est. Il a quitté l’Église mormone quand il est sorti du placard, et utilise son expérience et son passé pour renouveler la photographie. Les sujets actuels qu’il traite (recherche de validation sur les réseaux sociaux, gain d’abonnés, acceptation de soi, etc.) font à la fois réfléchir et plaisir à voir. Entre autres engagements personnels, tels que pour l’association SAGE, Advocacy & Services for LGBT Elders, un plaidoyer pour nos aînés de la communauté LGBT, Levi s’implique corps et âme dans les projets qu’il entreprend. Il intellectualise nos comportements, sans jamais être rébarbatif ni rasoir. C’est peut-être ce don qui fait l’artiste. Dans cet entretien avec le jeune newyorkais, on ne parle pas du passé mais de lui, pour essayer de comprendre un peu mieux les mécanismes d’un esprit aussi extraordinaire. Il fallait bien quelqu’un pour entamer ce travail d’introspection, et Levi Jackman l’a fait. La thérapie commence ici.

Décrivez-vous en trois mots.

Curieux, peu raffiné, inopiné.

À quoi ressemble une journée typique dans la vie de Levi Jackman ?

La plupart du temps, je commence mes matinées en écoutant des podcasts tout en essayant méticuleusement de dompter mes cheveux en bataille. Cette tentative d’arriver à une coiffure un tant soi peu « finie » est inévitablement vouée à l’échec. Une fois l’insatisfaction optimale atteinte, je les remets en pétard et commence ma journée. Ensuite, je me fais un cappuccino au lait d’avoine (parce que je suis tragiquement américain) et vais soit travailler pour Gordon Von Steiner (généralement à l’étranger) soit, si je suis chez moi à New York, j’écoute frénétiquement les informations, des émissions tendances (podcasts) tout en cherchant des idées ou des inspirations visuelles qui pourraient influencer ma prochaine œuvre. Je dessine des idées d’installation, puis je suis inévitablement distrait par la poussière, et je nettoie pendant trois heures. Je suis alors rongé par des memes trouvés sur Instagram reflétant la triste vérité et qui, en une image et une ligne, décrivent l’expérience politique dystopienne des États-Unis. Je réfléchis au sens de certains memes : sont-ils une forme évoluée de l’impressionnisme ? Là encore, je suis distrait par l’image d’un homme au corps ciselé, et décide que je dois aller à la salle de sport sans plus tarder. Une fois là-bas, je suis captivé par un rayon de lumière jaillissant de la fenêtre et projeté sur un miroir, et dont le reflet finit sa course sur une serviette reposant sur un tapis bleu. J’en prends la photo, et j’ai immédiatement l’impression d’avoir capturé quelque chose d’extraordinaire. C’est simple, mais c’est qu’on pourrait appeler une nature morte gay à la fois moderne et honnête. Je la publie sur Instagram. Seule la mère de mon fiancé l’aime. En semaine, mon fiancé rentre de l’hôpital (j’adore me vanter du fait que c’est un excellent chirurgien) vers 18h00, et on prépare le dîner ensemble en discutant de la façon dont le monde tombe à la fois en ruine et renaît potentiellement en quelque chose d’intéressant. Le week-end, on sort danser ou on regarde d’une traite des saisons entières de séries.


Y a-t-il un fil conducteur dans votre travail ?

L’utilité numérique, physique et émotionnelle de la photographie à notre époque.

Vous participez activement à la sensibilisation concernant les réseaux sociaux et à notre relation avec la technologie. Pourquoi ?

La façon dont les gens s’identifient à ce qu’ils voient sur les réseaux sociaux et l’influence que ces derniers ont sur le comportement humain me fascinent. Ma vie est très différente (pour le meilleur ou pour le pire) selon la façon dont j’utilise les réseaux sociaux, et je pense qu’il est de mon devoir d’apprendre comment et pourquoi.

[…]


Pour lire l’entretien complet, et voir des travaux extraits de Subjectivity, une œuvre de Levi Jackman, commandez sans plus attendre Sacrebleu! 7 ici.



photographies & collages de LEVI JACKMAN par BEN FOURMI

texte CYRIL VINCHON

interview TANIA MICHALIK

 
 
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